"Le comportement d'un individu est fonction de sa perception de la réalité." – Vincent Lenhardt
Diversité comportementale, exigence managériale
Manager une équipe, c'est conjuguer performance collective et diversité humaine. Parmi les défis les plus exigeants de ce rôle, il y a la gestion des comportements qui perturbent le fonctionnement du groupe : excès de colère, résistance au changement, plaintes récurrentes, isolement silencieux...
Ces attitudes ne font pas d'un collaborateur une "mauvaise personne". Elles sont le reflet d'émotions, de croyances, de stratégies adaptatives parfois inconscientes.
Le rôle du manager est de les observer, les comprendre, et les recadrer si nécessaire.
Gérer ce type de comportement ne s’improvise pas. Cela repose sur des compétences managériales bien précises : l’observation, l’écoute active, la reformulation, la gestion des émotions, le recadrage constructif, la posture assertive et la prise de recul systémique.
Une méthode en 5 étapes pour aborder les comportements difficiles
Avant toute action, prendre du recul est essentiel. Voici un cadre d’intervention simplifié et structurant :
Observer avec neutralité : repérer les faits, les signaux faibles, sans jugement
Communiquer avec justesse : ouvrir le dialogue au bon moment, avec une posture assertive.
Agir avec discernement (sans dramatiser ni minimiser) : ne jamais laisser une situation s’envenimer, intervenir avant qu’elle ne se dégrade.
Recadrer si besoin : avec respect, clarté, et dans une posture adaptée.
Accompagner dans la durée : par le feedback, le suivi, la formation ou le coaching
Typologies de comportements difficiles : comment les reconnaître, comment agir ?
Tous les comportements dits « difficiles » ne relèvent pas des mêmes dynamiques, ni des mêmes besoins sous-jacents. Je vous propose un tableau avec les typologies et moyens d'actions. Attention, il convient de rappeler que chaque individu est unique, chaque situation est différente. Il s'agit là d'une grille de lecture à lire avec recul, sans enfermer personne dans une étiquette.
L’impulsif
Comment le reconnaître ? Hausse du ton, réactions vives, impatience
Ce que cela peut refléter : Frustration, besoin de reconnaissance ou de contrôle
Conséquences si ignoré : Tension permanente, repli des autres
Comment agir concrètement ? Garder son calme, éviter les confrontations ou rapports de force, parler à froid, rappeler les règles, cadrer avec bienveillance
L’anxieux
Comment le reconnaître ? Doutes constants, perfectionnisme, sollicitations répétées
Ce que cela peut refléter : Manque de confiance, peur de l’échec
Conséquences si ignoré : Blocage ou surcharge, auto-sabotage
Comment agir concrètement ? Rassurer avec mesure, valoriser les succès, accompagner sans micromanagement, donner des repères clairs
Le négatif
Comment le reconnaître ? Rejet du changement, remarques systématiques
Ce que cela peut refléter : Besoin d’exister, peur de l’injustice
Conséquences si ignoré : Démotivation collective, ambiance dégradée
Comment agir concrètement ? Écouter sans juger, inclure dans la recherche de solutions, canaliser, reformuler
Le désengagé
Comment le reconnaître ? Désengagement, passivité, ironie
Ce que cela peut refléter : Ennui, perte de sens, isolement
Conséquences si ignoré : Effet de contagion, perte de qualité
Comment agir concrètement ? Revoir le sens du poste, écouter, proposer une mission pilote, envisager une réorientation
L’introverti
Comment le reconnaître ? Retrait, non-dit, peu d’interactions
Ce que cela peut refléter : Surcharge interne, peur du conflit
Conséquences si ignoré : Risque d’explosion tardive, sous-utilisation
Comment agir concrètement ? Attention à l’effet "cocotte-minute", créer un espace sécurisé, questionner en aparté, proposer un coaching
Le sûr de lui
Comment le reconnaître ? Monopolise la parole, coupe les autres
Ce que cela peut refléter : Besoin de reconnaissance, peur de l’erreur
Conséquences si ignoré : Sentiment d’inéquité dans l’équipe
Comment agir concrètement ? Valoriser les faits, cadrer avec humour, poser des limites claires
Le stratège flou
Comment le reconnaître ? Propos ambigus, discours différents selon les interlocuteurs, fausses informations
Ce que cela peut refléter : Besoin de contrôle, méfiance
Conséquences si ignoré : Déstabilisation de l’équipe, perte de confiance
Comment agir concrètement ? Clarifier les rôles (RACI), recadrer les comportements, garder de la distance
Le passif-agressif
Comment le reconnaître ? Se plaint systématiquement, se positionne en victime, se déresponsabilise
Ce que cela peut refléter : Manque de reconnaissance, peur du conflit
Conséquences si ignoré : Saturation des autres, perte de responsabilité
Comment agir concrètement ? Recontextualiser, objectiver les faits, encourager l’assertivité
Posture du manager : entre cadre et considération
Manager un collaborateur au comportement difficile, ce n’est pas chercher à changer une personne, mais à atténuer ce qui perturbe l’équilibre collectif.
Cela suppose de :
S’ancrer dans le réel : se baser sur des faits, pas sur des ressentis flous.
Rester disponible sans se sacrifier : protéger son énergie et garder la hauteur.
Tenir le cadre avec humanité : poser des limites pour sécuriser le groupe.
Favoriser la responsabilisation : inviter chacun à contribuer, selon ses ressources.
La clé est dans la justesse, pas dans l’autoritarisme. Manager, c’est agir avec éthique, au service de la dynamique collective.
Un acte managérial fort et à forte valeur ajoutée
Les comportements difficiles sont souvent des indicateurs de tension dans le système. Savoir les aborder avec lucidité, calme et méthode, c’est faire preuve d’une maturité managériale forte.
Ce qu’il faut aussi retenir :
Ces typologies ne sont pas des étiquettes, mais des grilles de lecture.
Chaque collaborateur est unique, chaque situation mérite une lecture contextualisée.
Il est essentiel de distinguer un comportement ponctuel d’une dynamique installée.
On ne change pas une personne, mais on peut agir sur ses comportements.
Le risque est souvent dans le « trop » ou le « pas assez » : trop cadrer, trop accompagner, ou à l’inverse, ne pas agir du tout.
Cela nécessite une posture ajustée, du recul, et une approche systémique.